Attention au contexte de la conclusion de reconnaissances de dettes !

C’est l’histoire d’une dame âgée de 73 ans, en difficultés financières et sans connaissances juridiques particulières, qui ne pouvait visiblement pas régler les honoraires de son avocat (honoraires qui n’avaient pas fait l’objet de factures indiquant le détail des prestations réalisées par l’avocat).

L’avocat avait alors demandé à sa cliente de lui signer une reconnaissance de dettes, devant un notaire. L’avocat entendait ainsi poursuivre le paiement de ses honoraires, sur la base de la reconnaissance de dette, à l’encontre de la vieille dame, en exécution forcée (huissiers, saisie, etc.).

Cependant, le régime juridique de la fixation et du recouvrement des honoraires de l’avocat repose sur des textes spécifiques. Ces textes prévoient notamment un arbitrage du Bâtonnier. En outre, l’avocat doit fournir à son client, avant tout règlement définitif, un compte détaillé faisant ressortir distinctement les frais et déboursés, les émoluments tarifés et les honoraires.

Dans cette affaire, la cour d’appel a relevé qu’en organisant et obtenant la signature d’un acte exécutoire de reconnaissance de dette, sans avoir établi de factures détaillant ses prestations, puis en utilisant ce titre pour diligenter une procédure d’exécution forcée, l’avocat s’était soustrait à l’arbitrage du bâtonnier en ne respectant pas la procédure d’ordre public de contestation et de recouvrement des honoraires imposée par l’article 174 du décret du 27 novembre 1991, et avait commis un manquement grave à la délicatesse envers une cliente âgée, en difficultés financières et sans connaissances juridiques, caractérisant ainsi des fautes disciplinaires.

La Cour de cassation a confirmé la position de la Cour d’appel. La validité de l’acte authentique valant reconnaissance de dette n’étant pas susceptible d’influer sur l’appréciation des fautes reprochées à l’avocat, lesquelles consistaient, non en la signature de cet acte, mais en la mise en œuvre d’une procédure d’exécution forcée fondée sur celui-ci, l’absence de factures et le comportement de l’avocat à l’égard de sa cliente, la cour d’appel a pu statuer comme elle a fait.

Moralité : la conclusion d’une reconnaissance de dette ne suffit pas en elle-même à assurer son exécution forcée à l’encontre du débiteur. Encore faut-il être de bonne foi et respecter des règles d’ordre public le cas échéant applicables à la relation…

Arrêt de la Première Chambre Civile de la Cour de cassation (n°14-23372) du 30 septembre 2015